Les pommes de la renaissance

Je fléchis et tombe, je suis une pomme qui refuse de vieillir, qui ne supporte pas le retour du soleil, je bondis, je rebondis j’ai les pommettes rouges, bombées, je ne crains rien.

Je roule vers l’hiver sans voir passer les saisons. J’observe l’arbre  qui m’a donné la vie, aucune feuille ne s’agite, ne cherche à m’aider, je suis seule. Je vais sécher au sol si tu m’abandonnes, je vieillirai trop vite.

En quelques années mes pépins ont disparu dans la terre, ils se sont enfouis, mais la vie sur le sol est parfaitement visible.

Aide-moi ! Toi  seul peux faire quelque chose !

Puis le printemps fixe son destin à cet endroit entre l’ombre et la lumière et il encourage une pousse à sortir de terre.

Me revoilà fragile mais déterminée je redresse la tête comme si l’hiver n’avait pas existé. Je suis fière et si j’ai des bleus au cœur je n’en parlerai pas.
Regardez-moi bien, moi le pommier parmi des milliers d’autres arbres, en Normandie du côté de Verneuil sur Havre fier et rieur, je refleuris et me reflète dans l’iris de vos yeux. C’est notre amitié qui à fait renaitre chaque année le printemps.Je regarde autour de moi et reconnaît à peine le paysage qui fut celui de ma précédente vie, les verts pâturages de ma mémoire. Seules quelques violettes dans la clairière me racontent et me chuchotent les souvenirs d’autrefois. Il y a dans l’air ce matin une brume qui avant de se dissiper s’assure que je suis assez forte pour grandir. Lorsqu’elle s’en ira en s’assurant que je suis assez mure pour être vue et assez solide pour ne pas fléchir face aux agresseurs qui cherchent à faire feu de mon bois.

Mariella